Les premiers poèmes néo-syriaques remontent à la fin du XVIe siècle et rappellent beaucoup les soghyatha et ‘onyatha de la liturgie syro-orientale tardive. Certains textes en langue moderne sont des adaptations ou de véritables traductions de modèles classiques. Les premiers auteurs de la littérature néo-syriaque semblent engagés dans une opération culturelle complexe. D’un côté, ils s’attachent à adapter l’héritage syriaque classique aux exigences d’une communauté qui utilise le dialecte néo-araméen pour sa communication quotidienne et qui est désormais ancrée dans la tradition populaire du Kurdistan; de l’autre, ils s’efforcent d’interpréter et de raconter, suivant les modes littéraires hérités de la tradition classique, la situation d’une minorité chrétienne contrainte de vivre sous le joug de dominateurs musulmans. Il en résulte un jeu complexe de renvois intertextuels et d’allusions interculturelles. Le lexique moderne est fortement influencé par l’arabe, auquel il emprunte certains termes soit directement soit indirectement, sous forme de mots d’origine arabe importés d’autres langues de la région (kurde, turc ou persan). L'utilisation de termes arabes prend la valeur d’une allusion interculturelle ou, mieux, interreligieuse. En utilisant de mots arabo-islamiques, le poète néo-syriaque affirme vigoureusement la supériorité de la révélation chrétienne. En outre, les vers néo-syriaques font partie d’un texte liturgique qui fait allusion à l'Apocalypse syriaque du Pseudo Methodios (VIIe siècle), en sélectionne et adapte quelques thèmes et motifs, en les réutilisant dans une perspective différente de la vision prophétique apocalyptique originale. Les “Grecs” de Byzance deviennent les précurseurs historiques de souverains à venir bons, “saints”, qui amélioreraient certainement les conditions de vie de la minorité chrétienne. Le modèle, à l’évidence très populaire et influent, de l’Apocalypse syriaque continue de fournir, mille ans plus tard, des schémas et des figures pour raconter le présent et pour imaginer, ou espérer, un avenir meilleur.

Littérature néo-syriaque et Islam. Échos de l'Apocalypse syriaque du pseudo Méthodios dans les premiers poèmes néo-araméens (Iraq du Nord, XVIIe siècle)

MENGOZZI, Alessandro
2006-01-01

Abstract

Les premiers poèmes néo-syriaques remontent à la fin du XVIe siècle et rappellent beaucoup les soghyatha et ‘onyatha de la liturgie syro-orientale tardive. Certains textes en langue moderne sont des adaptations ou de véritables traductions de modèles classiques. Les premiers auteurs de la littérature néo-syriaque semblent engagés dans une opération culturelle complexe. D’un côté, ils s’attachent à adapter l’héritage syriaque classique aux exigences d’une communauté qui utilise le dialecte néo-araméen pour sa communication quotidienne et qui est désormais ancrée dans la tradition populaire du Kurdistan; de l’autre, ils s’efforcent d’interpréter et de raconter, suivant les modes littéraires hérités de la tradition classique, la situation d’une minorité chrétienne contrainte de vivre sous le joug de dominateurs musulmans. Il en résulte un jeu complexe de renvois intertextuels et d’allusions interculturelles. Le lexique moderne est fortement influencé par l’arabe, auquel il emprunte certains termes soit directement soit indirectement, sous forme de mots d’origine arabe importés d’autres langues de la région (kurde, turc ou persan). L'utilisation de termes arabes prend la valeur d’une allusion interculturelle ou, mieux, interreligieuse. En utilisant de mots arabo-islamiques, le poète néo-syriaque affirme vigoureusement la supériorité de la révélation chrétienne. En outre, les vers néo-syriaques font partie d’un texte liturgique qui fait allusion à l'Apocalypse syriaque du Pseudo Methodios (VIIe siècle), en sélectionne et adapte quelques thèmes et motifs, en les réutilisant dans une perspective différente de la vision prophétique apocalyptique originale. Les “Grecs” de Byzance deviennent les précurseurs historiques de souverains à venir bons, “saints”, qui amélioreraient certainement les conditions de vie de la minorité chrétienne. Le modèle, à l’évidence très populaire et influent, de l’Apocalypse syriaque continue de fournir, mille ans plus tard, des schémas et des figures pour raconter le présent et pour imaginer, ou espérer, un avenir meilleur.
journal article - articolo
2006
Mengozzi, Alessandro
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